Quand un texte tombe-t-il dans le domaine public ?
Les œuvres littéraires et artistiques sont protégées par le droit d’auteur, qui confère à leurs créateurs des droits exclusifs sur leur utilisation et leur exploitation. Mais qu’en est-il lorsque ces droits arrivent à expiration ? C’est là qu’intervient la notion de domaine public, essentielle à comprendre pour tous ceux qui souhaitent utiliser ou diffuser des œuvres plus anciennes.
Le droit d’auteur : une protection limitée dans le temps
Le code de la propriété intellectuelle accorde aux auteurs des droits patrimoniaux et un droit moral sur leurs créations. Les droits patrimoniaux permettent de contrôler l’utilisation et l’exploitation commerciale d’une œuvre, tandis que le droit moral protège le lien indéfectible entre un auteur et son œuvre. Le droit moral comprend notamment :
- Le droit au respect de l’intégrité de l’œuvre
- Le droit à la paternité (droit pour l’auteur d’être cité)
- Le droit de divulgation (droit de décider quand et comment l’œuvre sera dévoilée au public)
- Le droit de retrait et de repentir
Cependant, à la différence du droit moral qui est perpétuel, les droits patrimoniaux ont une durée limitée. En France, les droits patrimoniaux durent toute la vie de l’auteur et pendant les 70 années qui suivent l’année civile de son décès, et ce pour toutes les œuvres, à quelques exceptions près. Par exemple, pour un écrivain mort en 1950, son œuvre est protégée jusqu’au 1er janvier 2021. Pour les œuvres de collaboration, les droits courent jusqu’à 70 ans après la mort du dernier co-auteur survivant.
Type d’œuvre | Durée des droits patrimoniaux |
---|---|
Œuvre individuelle | Vie de l’auteur + 70 ans |
Œuvre de collaboration | Vie du dernier co-auteur survivant + 70 ans |
Œuvre anonyme ou pseudonyme | 70 ans après publication |
Œuvre posthume | 25 ans après publication (si publication plus de 70 ans après décès de l’auteur) |
Bon à savoir : la durée des droits d’auteur varie d’un pays à l’autre. Il est donc important de vérifier les règles applicables pour chaque territoire.
L’entrée dans le domaine public : une liberté retrouvée
Une fois la période de protection expirée, l’œuvre n’est plus soumise aux droits patrimoniaux. On dit alors qu’elle « tombe » dans le domaine public. À compter de ce moment, le texte peut être librement utilisé par tous : il peut être reproduit, représenté, traduit, adapté, sans qu’il soit nécessaire de demander une autorisation ou de verser une rémunération.
L’entrée dans le domaine public marque donc la fin du monopole des ayants droit sur l’exploitation de l’œuvre. C’est une étape importante qui permet de faciliter l’accès du public à notre patrimoine culturel et de favoriser la création de nouvelles œuvres inspirées des classiques du passé. De grands noms de la littérature comme Molière, Victor Hugo ou encore Jules Verne sont ainsi librement accessibles à tous, permettant :
- Leur libre réédition et traduction
- Leur adaptation dans d’autres médias (films, pièces de théâtre, bandes dessinées…)
- Leur libre numérisation et mise en ligne
- Leur utilisation pour créer de nouvelles œuvres (suites, pastiches, fanfictions…)
À noter : dans certains pays, il existe un domaine public « payant ». Les œuvres peuvent être utilisées librement mais en contrepartie du paiement d’une redevance, souvent destinée à financer la création artistique.
Les exceptions au principe du domaine public
Il existe cependant quelques exceptions au principe de la libre utilisation des œuvres du domaine public :
- Certaines éditions récentes d’œuvres anciennes peuvent bénéficier d’une protection spécifique au titre du droit d’auteur, en raison du travail éditorial réalisé sur le texte original (notes, commentaires, illustrations, mise en page…)
- Les droits voisins du droit d’auteur, comme ceux des artistes-interprètes ou des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes, peuvent également s’appliquer à certaines utilisations des œuvres du domaine public
- Le droit moral de l’auteur, qui est perpétuel, doit toujours être respecté même après le passage de l’œuvre dans le domaine public. Cela implique notamment de ne pas dénaturer l’œuvre et de citer le nom de l’auteur lors de son utilisation.
Conseil pratique : avant d’utiliser une œuvre que vous pensez tombée dans le domaine public, vérifiez toujours attentivement son statut juridique. Des outils en ligne comme Public Domain Calculators peuvent vous y aider. En cas de doute, n’hésitez pas à vous renseigner auprès d’un juriste spécialisé.
En définitive, le passage dans le domaine public est une étape charnière dans la vie d’une œuvre. Il marque la fin des droits patrimoniaux et ouvre la voie à une diffusion plus large du texte, qui peut désormais être lu, étudié et réinterprété librement. Une façon de faire vivre notre héritage culturel à travers les générations, de stimuler la créativité de tous en puisant dans les trésors littéraires du passé, et de promouvoir un libre accès à la culture et à la connaissance.
Bon à savoir : Il existe de nombreuses ressources en ligne pour trouver facilement des œuvres du domaine public, comme la bibliothèque numérique Gallica, le Projet Gutenberg ou encore Wikisource. De quoi donner des idées pour de nouveaux projets éditoriaux !